La justice reconnait une maladie liée aux ondes
Causalité entre EHS et travail : un premier verdict qui en appelle d’autres
Bien que la dangerosité des ondes électromagnétiques fasse toujours débat au sein de la communauté scientifique, la justice a décidé, pour la toute première fois, de reconnaître une maladie professionnelle liée à l’électrosensibilité. Un premier cas qui pourrait, selon toute vraisemblance, faire office de jurisprudence pour toutes les personnes électro-hypersensibles (EHS). Explications.
Dangerosité des ondes, un verdict inédit en France
Le verdict est tombé le 27 septembre 2018 : la maladie d’un homme devra être prise en charge au titre des accidents du travail, suite à un diagnostic d’hypersensibilité électromagnétique. C’est le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Versailles qui a rendu ce jugement, une grande première en France. L’employé en question, un technicien au sein d’une entreprise de télécommunication, a été diagnostiqué EHS dès 2011. Malgré les recommandations de la médecine du travail d’opérer un changement de poste afin de réduire son exposition aux champs électromagnétiques, son employeur a décidé de le maintenir à sa fonction, sans aucun aménagement.
Deux ans plus tard, le 6 novembre 2013, l’homme est victime d’un malaise sur son lieu de travail. Alors qu’une première expertise médicale avait attribué ce malaise à des troubles anxieux d’origine psychiatrique, un second rapport a estimé qu’il pouvait être dû à une hypersensibilité aux ondes électromagnétiques. Un malaise dont le lien de causalité avec l’environnement de travail ne pouvait pas être totalement exclu, toujours selon cette deuxième expertise. Pour Maître Lafforgue, l’avocat du plaignant, ce jugement inédit en France « ouvre une brèche pour d’autres victimes électrohypersensibles ». Et il ne croyait pas si bien dire.
Un second cas jugé 3 mois plus tard
Seulement trois mois après ce verdict, un second plaignant est parvenu à faire reconnaître en justice une maladie liée aux ondes électromagnétiques. Nous sommes le 17 janvier 2019, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise vient de reconnaître pour la toute première fois une maladie professionnelle due aux ondes pour un fonctionnaire. L’homme en question, un agent travaillant pour l’IRSTEA (Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture), est tombé malade seulement quelques mois après sa prise de fonction. Malgré cela, il continue de travailler pendant 4 années au sein d’un laboratoire de chimie de l’organisme, où il est exposé à différents champs électromagnétiques, dont certains provenant d’un spectromètre de masse isotopique.
Alors que le président de l’IRSTEA avait refusé de reconnaitre le caractère professionnel de cette maladie, le tribunal administratif en a décidé autrement. En plus d’être inédit pour la fonction publique, ce jugement reconnait pour la première fois que la sensibilité aux ondes électromagnétiques peut être considérée comme une maladie liée à l’environnement de travail. Une grande victoire pour Sophie Pelletier, la présidente de Priarterm, une association défendant les personnes victimes d’électro-hypersensibilité.
Des jugements de bon augure pour les EHS
Ces deux verdicts posent cependant question car ils semblent être en contradiction avec les avis sanitaires. En mars 2018, l’ANSES (Agence sanitaire nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a établi que la souffrance des personnes EHS correspond à une réalité. Toutefois, aucun élément ne permet de faire le lien entre ces troubles et l’exposition aux ondes électromagnétiques. Alors, comment la justice a pu établir un lien de causalité entre le malaise des plaignants et leur exposition, alors que la science ne le fait pas ?
En réalité, les jugements scientifiques et médicaux peuvent parfois se contredire. Le meilleur exemple est certainement le lien entre la vaccination et le développement de la sclérose en plaque, accepté par les tribunaux, réfuté par les scientifiques. Alors que la science n’établit une causalité qu’en présence de statistiques significatives et de résultats reproductibles, le tout sur un échantillon important, la justice peut se contenter de le faire grâce à des indices précis, graves et concordants. C’est donc au juge d’établir, au cas par cas, si les ondes sont responsables d’une maladie, notamment en se basant sur l’existence de cas similaires. De bon augure pour les personnes souffrant d’hypersensibilité électromagnétique qui, à l’avenir, pourront certainement s’appuyer sur ces deux verdicts pour faire reconnaître leur maladie.